La rue du Sérail est l'incarnation des Deux Aras: sombre, tortueuse, aux murs immenses et aux maisons basses, elle est pourtant une rue très habitée, même si ses habitants aiment à se faire silencieux. Des sorciers en cape y marchent parfois côte à côte, sans un mot, leurs bottes semblent survoler de quelques millimètres la surface des pavés tant leurs fers ne troublent pas la quiétude inquiétante des lieux. La rue du Sérail ressemble à ces "coupes gorges" moldus hérités de vieilles histoires, et souffre d'une mauvaise réputation qu'elle ne semble pourtant pas mériter.

Voilà bien le seul café du quartier des Deux Aras, et en effet, on se demande bien comment la Lune Rousse fait-elle pour trouver des clients. Elle en trouve, pourtant, elle sait apparaitre à ceux qui la cherchent. La Lune Rousse est incartable: seuls ceux qui savent où elle se trouve peuvent l'atteindre. Pour ça, il faut frapper trois fois contre une porte de bois qui ressemble à toutes les autres, au milieu d'une rue qui ressemble à toutes les autres, et prononcer un mot de passe qui change toutes les semaines. On se dirige alors au travers un couloir bas de plafond et sans lumière, pour distinguer à terme une faible lueur dorée. Là, poufs, tables basses, rideaux de soie, thés et cafés, on a alors l'impression de se retrouver dans un pays oriental tel qu'il est décrit dans l'imaginaire européen. Certains racontars disent que des danseuses à moitié nues y font parfois des danses du ventre envoûtantes...

Sans issue. Une seule boutique caractérise cette impasse noire et jonchée de fientes de pigeons: Palsambleu, objets rares, et souvent déconseillés. Un seul élément jurant avec le décor persiste à donner à l'impasse du Gobelin une allure originale: la vieille pendule à moitié détruite, fixée contre un mur et indiquant depuis toujours minuit douze. Lorsque le vent souffle trop fort, elle se balance et cogne contre le mur effrité dans un "clac" agaçant pour certains, effrayant pour d'autres.